Depuis le 20 janvier, des enseignants et lycéens perturbent les nouvelles épreuves communes du baccalauréat, entraînant parfois leur report. Des actions passibles de sanctions.
Hippolyte Radisson, le 04/02/2020 à 06:00
Un zéro pointé. C’est ce que risquent de voir apparaître sur leur dossier scolaire les lycéens qui ont décidé de ne pas participer aux épreuves de contrôle continu. Pour dénoncer le nouveau bac – qu’ils jugent inégalitaire – des élèves ont boycotté ces « E3C », dont la première session s’échelonne depuis le 20 janvier et jusqu’au 4 mars. Certains ont été, depuis, « menacés d’un zéro pour avoir participé à la mobilisation et n’avoir pas composé », relève le SNES-FSU – syndicat majoritaire chez les enseignants –, sur son site.
Les lycéens n’ayant pas le droit de grève, l’article 12 du règlement des examens du bac dispose en effet que « la note zéro est attribuée au candidat » lorsque l’absence « ne relève pas d’un cas de force majeure ». Ce que le site du service public définit comme un événement à la fois « imprévisible, insurmontable et qui échappe au contrôle de la personne concernée ».
Des recours possibles pour les lycéens
Ces candidats qui ont choisi de ne pas composer ne pourraient donc pas passer d’épreuves de rattrapage. Il revient au chef d’établissement de faire le « tri » entre ceux qui ont choisi de ne pas se rendre aux épreuves et ceux qui n’ont pas pu : « Là est la difficulté, estime maître Valérie Piau, avocate spécialiste en droit de l’éducation. Certains élèves n’ont pas pu composer car ils ont été empêchés d’entrer dans les établissements, y compris parfois par des professeurs opposés à la tenue des E3C. »
Pour contester un zéro, il existe deux solutions : « La famille peut faire un recours hiérarchique par lettre recommandée auprès du recteur, détaille l’avocate. Elle peut aussi saisir le tribunal administratif en s’appuyant sur le principe de rupture d’égalité puisque l’élève est privé de rattrapage. »
D’autres procédures ont par ailleurs été engagées contre des lycéens contestataires auxquels sont reprochées des infractions de droit commun : suite au blocage du lycée parisien Maurice Ravel vendredi 31 janvier, trois mineurs accusés d’avoir brûlé une poubelle ont été déférés et se sont vus infliger une mesure de réparation pénale.
Retenue de salaire pour les enseignants
Du côté des enseignants, la participation aux blocages ou le refus de surveiller ou de corriger des épreuves conduisent le ministère de l’éducation à les considérer comme des grévistes. Ils pourront, à ce titre, écoper de retenues sur salaire par journées non travaillées.
Mais « le fait de faire grève n’est pas un motif de sanction, précise Valérie Piau. C’est la participation à des blocages qui peut être sanctionnée par la hiérarchie avec tout un panel : l’avertissement, le blâme, le déplacement… Des sanctions qui peuvent aller jusqu’au renvoi. »
« S’il y a eu dégradation ou atteinte à la liberté d’entrer dans l’établissement », les enseignants peuvent aussi être poursuivis pénalement, continue l’avocate. De même, la loi punit d’un an d’emprisonnement et 7 500 € d’amende l’intrusion dans un établissement scolaire « sans y être habilité (…) ou avoir été autorisé par les autorités compétentes, dans le but de troubler la tranquillité ou le bon ordre ». « À Clermont-Ferrand, cinq enseignants ont été convoqués au commissariat pour intrusion », déplore Frédérique Rolet, secrétaire générale du SNES-FSU.
Contacté, le ministère de l’éducation nationale n’a pas répondu à nos sollicitations. L’an passé, des surveillants et correcteurs avaient fait grève pour protester contre la réforme du bac. Près de 4 000 enseignants s’étaient vus infliger des retenues sur salaire. Une cinquantaine de blâmes et d’avertissements avaient par ailleurs été prononcés à leur encontre.
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