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Harcèlement scolaire : quelles sanctions pour les élèves harceleurs ?

Des sanctions disciplinaires et pénales peuvent s'appliquer. Les peines ne sont pas les mêmes selon que l'enfant est mineur ou majeur.

Actu.fr, par Léa Giandomenico, publié le 12 Juin 23 à 20:43 mis à jour le 12 Juin 23 à 21:14


Lindsay et Lucas, âgés de 13 ans, étaient harcelés à l’école. Ils ont fini par se donner la mort, en janvier et en mai 2023, suscitant une vague d’émotion et d’indignation dans le pays. Leurs suicides ont relancé le débat sur le harcèlement scolaire, subi par près de 700 000 enfants chaque année en France.


Pour tenter d’endiguer ce phénomène, le ministre de l’Éducation Pap Ndiaye a annoncé une heure de sensibilisation à la thématique « harcèlement et réseaux sociaux », durant la semaine du lundi 12 au vendredi 16 juin 2023, dans 7 000 collèges de France. Mais quelles sanctions pour un élève qui en harcèle un autre ? On fait le point.


Jusqu’à 10 ans de prison et 150 000 € d’amende


Depuis le 3 mars 2022, une loi vise à combattre le harcèlement scolaire, et améliore le droit à une scolarité sans harcèlement. Harcèlement qui toucherait près d’un élève sur 10 chaque année, soit environ 700 000 jeunes.


Ainsi, cette loi crée un nouveau délit dans le code pénal : celui de harcèlement scolaire, selon le site service-public.fr. Les faits de harcèlement moral commis à l’encontre d’un élève constituent un harcèlement scolaire.


Mais il nécessite « une double réponse à la fois sur le plan scolaire et pénal dans les cas les plus graves. L’action pénale et scolaire n’ont pas le même but », précise Maitre Valérie Piau, avocate spécialiste en droit de l’éducation, jointe par actu.fr.


Des sanctions disciplinaires


D’abord, les sanctions peuvent être disciplinaires, au sein de l’établissement : l’avertissement, le blâme, la mesure de responsabilisation, l’exclusion temporaire de la classe (qui ne peut excéder huit jours), l’exclusion temporaire de l’établissement (qui ne peut excéder huit jours), l’exclusion définitive de l’établissement.

Dans ce cas, la réponse vient de l’Éducation nationale et « vise à faire cesser immédiatement le harcèlement au sein de l’école vis-à-vis de la victime, à donner une sanction pédagogique au harceleur et à promouvoir la prévention auprès des élèves », note Maitre Valérie Piau.


Une réponse disciplinaire « qui doit être extrêmement rapide vis-à-vis de l’élève pour faire cesser le harcèlement. L’établissement scolaire doit assurer la sécurité des élèves et agir en cas de harcèlement. Le droit pour chaque élève de ne pas être harcelé à l’école est inscrit depuis 2019 dans le code de l’éducation, actuellement à l’article L111-6, explique l’avocate.

"Plus le harcèlement sera dans la durée, plus les conséquences seront dramatiques pour l'élève." Maitre Valérie Piau, Avocate spécialisée en droit de l'éducation


L’avocate conseille toujours aux parents de faire un écrit à la direction de l’établissement pour appuyer les faits.


Des sanctions pénales

Et puis, les sanctions peuvent être pénales : « La réponse pénale vise à porter plainte en cas d’infraction et à obtenir la condamnation pénale de l’auteur. La victime peut se constituer partie civile pour solliciter des dommages-intérêts », explique l’avocate spécialisée en droit de l’éducation.

Le délit de harcèlement scolaire concerne les élèves, les étudiants ou les personnels des établissements scolaires et universitaires.

Une réponse pénale « souvent plus lente » au vu des délais d’enquête par la police et de convocation par les tribunaux. « Mais il est important de ne pas réduire le harcèlement à une infraction pénale, c’est important d’avoir une réponse de l’éducation nationale. »


Les sanctions disciplinaires et pénales sont indépendantes les unes des autres : « Il peut y avoir sanction disciplinaire au sein de l’établissement scolaire sans sanction pénale, notamment quand la famille n’a pas porté plainte ou que les conditions d’infraction ne sont pas réunies. En effet, la qualification pénale est plus stricte », précise Maitre Valérie Piau.

Les sanctions sont différentes si l’auteur du harcèlement est mineur ou majeur, et les peines prévues dépendent de la gravité des conséquences du harcèlement sur la personne visée.


Ainsi, si l’auteur est mineur :


Lorsque le harcèlement scolaire n’a pas entraîné d’incapacité totale de travail (jours d’école manqués) ou qu’il a entraîné une incapacité totale de travail de moins de 8 jours, il est puni de 1 an et demi d’emprisonnement et de 7 500 euros d’amende au maximum.

Lorsque le harcèlement scolaire a entraîné une incapacité totale de travail de plus de 8 jours, les peines sont portées à 2 ans et demi et 7 500 euros d’amende au maximum.

Lorsque le harcèlement scolaire a conduit la personne visée à se suicider ou à tenter de se suicider, les peines sont portées à 5 ans d’emprisonnement et 7 500 euros d’amende au maximum.


Les mesures et sanctions applicables aux mineurs de moins de 13 ans relèvent de dispositifs spécifiques. « Ils ne peuvent en aucun cas aller en prison ou payer une amende », détaille l’avocate. Et pour cause, si l’élève qui harcèle a moins de 13 ans, on dit qu’il n’a pas le discernement qui permet de le reconnaitre coupable, il écopera donc de mesures de nature éducative.


À noter que la sanction est appréciée au jour où l’infraction a été commise, même si l’enquête prend plusieurs années, et que l’élève harceleur atteint la majorité ou a désormais plus de 13 ans.


Mais les parents peuvent être exposés s’il y a une plainte au pénal, « avec des mesures du juge pour enfants comme le placement ou des mesures d’éloignement ».


Si l’auteur est majeur :

  • Lorsque le harcèlement scolaire a causé une incapacité totale de travail inférieure ou égale à 8 jours ou n’a entraîné aucune incapacité de travail, il est puni de 3 ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende,

  • Lorsque les faits ont causé une incapacité totale de travail supérieure à 8 jours (ce qui vaut aussi pour une incapacité de se rendre à l’école pour un écolier, un collégien, ou un étudiant), ils sont punis de 5 ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende

  • Lorsque les faits ont conduit la victime à se suicider ou à tenter de se suicider, ils sont punis de 10 ans d’emprisonnement et 150 000 euros d’amende.

Des sanctions qui peuvent également être prononcées à l’égard d’un professeur, à l’école primaire, au lycée ou au collège, « de toute personne au sein de l’établissement qui serait reconnue coupable d’avoir participé à du harcèlement ». Et ce lorsque les faits continuent alors que l’auteur ou la victime n’étudie plus ou n’exerce plus au sein de l’établissement.

En plus de ces sanctions, un stage de « sensibilisation aux risques liés au harcèlement scolaire » pourra être prononcé par le juge, et les téléphones et ordinateurs utilisés pour harceler un élève ou un étudiant pourront être saisis et confisqués, précise le site service-public.fr.

Même si ces textes de loi existent, et permettent de sanctionner le harcèlement scolaire, « ils sont apparus très tardivement », note l’avocate spécialiste, aussi auteur du Guide Piau, les droits des élèves et des parents d’élèves, chez l’Etudiant.


"Il y a encore des progrès à faire, car les textes ne sont pas encore appliqués jusqu'au bout, d'autant plus que le harcèlement se passe souvent sur internet".Maitre Valérie Piau, Avocate spécialisée en droit de l'éducation.


Comment qualifie-t-on des faits de harcèlement ?

Mais comment reconnaître qu’un enfant est harcelé par un camarade ?

Le harcèlement se définit comme une violence répétée qui peut être verbale, physique ou psychologique. Cette violence se retrouve aussi au sein de l’école. Elle est le fait d’un ou de plusieurs élèves à l’encontre d’une victime qui ne peut se défendre.

Ministère de l'Éducation nationale

« Lorsqu’un enfant est insulté, menacé, battu, bousculé ou reçoit des messages injurieux à répétition, on parle alors de harcèlement », précise le ministère de l’Éducation nationale.

On peut isoler trois caractéristiques du harcèlement en milieu scolaire :

  • La violence : c’est un rapport de force et de domination entre un ou plusieurs élèves et une ou plusieurs victimes.

  • La répétitivité : il s’agit d’agressions qui se répètent régulièrement durant une longue période.

  • L’isolement de la victime : la victime est souvent isolée, plus petite, faible physiquement, et dans l’incapacité de se défendre.

Le harcèlement se fonde sur le rejet de la différence et sur la stigmatisation de certaines caractéristiques, telles que l’apparence physique, le sexe, l’identité de genre, le handicap, un trouble de communication, l’appartenance à un groupe social ou culturel particulier ou des centres d’intérêts différents.







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